La Société Informatique de France (SIF) est ravie d’annoncer les récipiendaires 2024 du prix de thèse Gilles Kahn. Ce prix, placé sous le patronage de l’Académie des Sciences, attribué chaque année depuis 1998, met en lumière de jeunes scientifiques dont les travaux de thèse constituent une avancée remarquable pour la discipline informatique. Le prix 2024 est décerné à Emilie Yu pour sa thèse intitulée « Designing Tools for 3D Content Authoring Based on 3D Sketching » préparée à Inria Côte d’Azur. Les deux accessits sont décernés, par ordre alphabétique, à Mathieu Even pour sa thèse intitulée « Towards Decentralization, Asynchrony, Privacy and Personalization in Federated Learning» réalisée au DIENS (Inria/ENS Paris/CNRS) et Giannos Stamoulis pour sa thèse intitulée « Logics and Algorithms for Graph Minors » préparée au LIRMM, UMR 5506 (CNRS), Université de Montpellier.
La thèse d’Emilie Yu, intitulée « Designing Tools for 3D Content Authoring Based on 3D Sketching », s’intéresse à la création, à l’édition et à l’animation de formes tri-dimensionnelles à base d’esquisses. Le dessin 2D et les esquisses 2D sont des outils extrêmement communs pour la création graphique et le design industriel. Proposer un outil de dessin 3D, aussi accessible et efficace pour exprimer des idées que le dessin 2D est un problème ouvert en informatique graphique et réalité virtuelle et, pour être exploitable dans les processus de création 3D, doit répondre aux attentes des graphistes et designers dans leurs méthodes de travail et d’expression. Ce sont là les multiples défis auxquels Emilie Yu s’est intéressée pendant sa thèse.
Les travaux menés par Emilie Yu sont fondés sur les notions de « coup de crayon 3D », « d’esquisse 3D » et de « couches d’édition 3D » permettant de définir par esquisse à la fois la forme et l’apparence d’un objet 3D à l’aide d’outils et de processus similaires à ce qui existe en 2D.
Le jury a été impressionné par la qualité des résultats obtenus et communiqués au meilleur niveau international ainsi que par le travail de fond mené par Emilie Yu pour comprendre les attentes des graphistes et concevoir un système de dessin 3D adapté.
Le travail d’Emilie Yu, fondé sur des entretiens avec des graphistes, est primordial pour l’acceptabilité des outils de création proposés. De nombreux travaux futurs pourront ainsi s’appuyer sur ses résultats, synthétisés au sein d’un manuscrit remarquablement didactique et extrêmement agréable à lire.
La thèse de Mathieu Even, « Towards Decentralization, Asynchrony, Privacy and Personalization in Federated Learning », porte sur l’apprentissage fédéré, un paradigme où l’entraînement de modèles d’intelligence artificielle est effectué de manière collaborative et distribuée, sans centralisation des données. Dans ce cadre, les défis sont nombreux : la décentralisation des communications, le caractère asynchrone des échanges entre les nœuds, la préservation de la confidentialité des données et la personnalisation des modèles pour chaque participant.
Les travaux de Mathieu Even se distinguent par une approche unifiant des problématiques théoriques et pratiques. Ses résultats répondent à plusieurs de ces défis.
Outre son contenu scientifique remarquable, la thèse de Mathieu Even s’illustre par une production exceptionnelle, matérialisée par des publications de premier plan dans les meilleures conférences internationales. Plusieurs de ses articles ont déjà influencé la recherche ultérieure. La clarté et la pédagogie de son manuscrit, qui propose une longue introduction pour contextualiser les enjeux et guider le lecteur, ont également été saluées par le jury.
En somme, les travaux de Mathieu Even représentent une avancée majeure pour la compréhension et la mise en œuvre d’algorithmes d’apprentissage collaboratif. Ils contribuent directement au développement de solutions d’intelligence artificielle plus efficaces, robustes, équitables et respectueuses de la vie privée.
La thèse de Giannos Stamoulis, « Logics and Algorithms for Graph Minors » s’intéresse à l’étude algorithmique de problèmes de graphes, et notamment à la triple question générale suivante : quand, pourquoi et comment certains problèmes peuvent-ils parfois être résolus efficacement. L’objet central qui permet de répondre à celle-ci est la notion de méta-théorème algorithmique, un outil générique combinant logique, structure des graphes et combinatoire afin de permettre la dérivation automatique d’algorithmes.
Les travaux de Giannos Stamoulis réussissent notamment à unifier des résultats existants au sein d’un nouveau cadre théorique. Le jury a été impressionné par les résultats obtenus tant sur leur quantité que par leur profondeur. Le manuscrit de thèse a aussi été particulièrement apprécié pour son aspect didactique. Il aborde de manière intuitive des notions combinatoires complexes et démontre le recul impressionnant de Giannos Stamoulis sur un domaine dont il est désormais devenu un acteur incontournable sur le plan international.
En résumé, les recherches conduites par Giannos Stamoulis fournissent une abstraction rigoureuse des notions historiques du domaine afin de comprendre les raisons intrinsèques pour lesquelles des techniques algorithmiques permettent la résolution efficace de problèmes fondamentaux. Elles font d’ores et déjà référence sur la scène internationale.